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Halte aux cumuls des mandats !

Halte aux cumuls des mandats !


« Le cumul des mandats de député ou de sénateur devrait être interdit. Choisi par une circonscription ou par des élus d’un département, le parlementaire représente la nation une et indivisible. Il est inconvenant qu’il profite de ce mandat, qui le fait juge et partie, pour exercer un mandat local avec un pouvoir nécessairement démesuré par rapport à ses collègues qui exercent un mandat local identique, mais n’exercent que celui là ».

 

Vingt ans après cette vertueuse déclaration, reproduite et confirmée sans interruption au fil du temps par les constitutionnalistes et politologues, comme par l’opinion publique, ce privilège indu perdure pourtant bel et bien.

 

 

Ce « sommet de l’iceberg » des faiblesses de notre système politique est devenu une sclérose institutionnelle qui gangrène l’ensemble de son fonctionnement. 

 

Les conséquences de cette pratique contestée, outre celles avancées par l’auteur précité, sont bien connues. Citons, parmi les plus flagrantes :

 

-          Une impréparation flagrante aux affaires du pays : consacrer son temps à d’autres activités que celles pour lesquelles les parlementaires ont été élus, comme le font 80 % d’entre eux, est évidemment préjudiciable à l’intérêt national. Ainsi, par exemple, peut-on estimer que si tous avaient été pleinement attachés à la prévention des risques financiers qui s’annonçaient en 2008, à l’instar de l’apparition des mêmes prémices constatées lors des décennies passées, la France y aurait gagné… Par ailleurs, l’on sait qu’entre s’occuper d’activités locales porteuses d’échanges conviviaux, et s’astreindre à l’étude de dossiers internationaux, le choix est vite fait. Il suffit de porter son regard sur les luxueuses brochures qui relatent les faits et gestes des élus aux conseils généraux et régionaux pour s’en convaincre. Enfin un président de société qui ne consacrerait que 20 % de son temps à sa fonction ne durerait pas plus d’un jour à son poste. Pour ces dirigeants, comme pour les citoyens attentifs, quel spectacle de voir tant de déni du bien commun, par ceux-là même qui sont en charge de l’économie du pays.

 

-          L’outrance particulière de ceux (tous !) qui prônent la lutte contre le chômage, alors qu’ils s’adonnent à un cumul qui lui est contraire !

 

-          La mainmise autarcique de l’intéressé sur une circonscription le conduit inéluctablement à favoriser les intérêts qui le servent et à entretenir de multiples façons ses soutiens. Cette attitude s’oppose à l’éclosion de jeunes talents qui pourraient le remplacer, rebutés par un parcours électoral a priori semé d’embuches par ce cumul, cela avec le consentement cynique des partis. Le professionnalisme de la politique est devenu la règle au profit de personnes qui s’arrogent une fallacieuse compétence d’experts politiques à vie. Le résultat est sous nos yeux. Le renouvellement du personnel politique est sclérosé.

 

-          « Particularité » du système politique français, cette incongruité nous ridiculise devant la majeure partie des États démocratiques du monde, tout autant que les décevantes et puériles « justifications » avancées par leurs bénéficiaires pour maintenir le statu quo. Ainsi l’expérience du terrain est régulièrement avancée. Mais elle ne fait que réduire la conception de l’intérêt général à une accumulation d’intérêts territoriaux.

 

-           Bien d’autres raisons justifient encore que soit interdit ce cumul : l’image de profiteur des élus ; la sur-rémunération liée à ces privilèges ; l’absentéisme parlementaire ; etc.

 

 

 

Devant de telles évidences, le temps est venu d’assainir notre  paysage politique. Le nouveau Président s’y est engagé. Déjà des candidats placent cet impératif en tête de leur engagement électoral. Mais l’on sait que sans un fort appui de l’opinion publique, l’inertie du système prévaudra.

 

Une loi organique est nécessaire pour supprimer cette outrance, sinon un référendum. Cependant, avant d’aller aussi loin, la simple vertu assortie d’un louable élan démocratique pourrait inciter les dirigeants politiques et les partis, quelle que soit leur sensibilité, à ouvrir le chemin. Il suffirait de ne proposer que des candidats respectueux de cet engagement !

 

Mais ne restons pas nous-mêmes les bras ballants. Prenons l’initiative d’aller en ce sens lors de ces prochaines élections législatives. Confirmons notre choix, sans esprit partisan. Élisons les seuls candidats qui s’engagent à n’employer leur précieux temps qu’aux affaires publiques qui relèvent de leur unique mandat. Suivons en cela le Général de Gaulle (En écoutant de Gaulle, Claude Guy) qui souhaitait pour la France un régime où des hommes se consacreraient uniquement aux affaires publiques, suivant les absolus de la discipline, du prestige et de la grandeur.

 

Ainsi, ferons-nous preuve d’esprit citoyen et acte de profonde responsabilité, pour que progresse davantage l’idéal démocratique.

 

 

 

Collectif des signataires

 

Paul Bernard, préfet de région honoraire (auteur de La France fidèle à son destin. La révolte des citoyens)

Pierre Lascoumes, directeur de recherche au CNRS

Daniel Lebègue, président de Transparence-International France

Michel Le Net, ingénieur général honoraire des Ponts et Chaussées

 

 

 

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