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Pour une approche "gagnant-gagnant" de la RSE

Pour une approche


A l'heure où la méfiance envers les institutions ne cesse de croître, les opinions publiques se montrent particulièrement sévères à l'égard des entreprises et de leurs dirigeants acharnés qu'ils seraient à bâtir leurs profits aux dépens de l'humanité comme de la nature. L'étude Edelman 2015 sur la confiance montre que dans la majorité des pays observés, plus de la moitié des sondés ne font pas confiance aux entreprises et que dans les trois-quarts des pays seuls 43 % accordent crédit aux propos des patrons d'une entreprise pour former leur avis sur celle-ci. Les engagements sociétaux proclamés au fil des pages des rapports de développement durable n'y changent rien. Loin de convaincre, ils font l'objet de suspicions sur leur sincérité quand ils ne sont pas taxés de cynisme. Pour être caricaturale, cette vision, dogmatiquement relayée par certaines ONG et associations qui, en revanche, bénéficient d'une forte cote de crédibilité, se trouve confortée par une communication maladroite.



Dans bien des cas, en effet, les démarches de responsabilité s'expriment sous forme de litanies de dons et d'actions ; de sorte qu'elles sont davantage perçues comme des "BA" destinées à s'acheter une conduite plutôt qu'une donnée stratégique participant concomitamment à l'atteinte des objectifs de l'entreprise et à l'amélioration des conditions de vie des communautés au sein desquelles elle évolue. Un tel biais prête le flanc à ce que l'on pourrait appeler le "responsibilitywashing" par extension du "greenwashing" réservé aux choses de l'environnement. Il accrédite, en outre, le sentiment que l'engagement responsable ne répond qu'à un  enjeu de réputation, qu'il n'est qu'une réponse aux obligations de la RSE implicitement présentée comme une contrainte non comme une orientation stratégique. En d'autres termes, qu'il ne s'agirait que d'une affaire de communication et de coercition.



Création de valeur partagée


La réalité est toute autre. La RSE est à ce point considérée par la sphère économique et financière, que dès 1999, Dow Jones créait le Dow Jones Sustainabilty Index (DJSI), premier indice boursier à apprécier la performance d'une entreprise à l'aune de la force de son engagement dans le développement durable. Ce n'est pas un hasard non plus si des groupes comme IBM, General Electric, Unilever, Nestlé, Novartis souscrivent au concept de création de valeur partagée développé par un professeur de Harvard, Michael Porter. Sans chercher à le dissimuler, ces multinationales ont compris qu'au-delà de la recherche de profit immédiat, leur performance à plus long terme impose qu'elles se préoccupent de façon active et, disons le, intéressée, de la santé et de l'éducation de leurs clients présents et futurs, du tarissement des ressources naturelles indispensables à la poursuite de leurs activités, de la pérennité de leurs fournisseurs, des situations de précarité des populations au milieu desquelles elles opèrent.



La finalité d'une entreprise est bel et bien de croître et de prospérer; elle ne doit pas redouter de le proclamer haut et fort. Pas seulement lors des réunions d'actionnaires et dans son rapport d'activité. Pour croître et prospérer, elle doit s'appuyer sur des salariés compétents, motivés traités à la hauteur de leur mérite. Pour se développer, elle doit disposer d'une clientèle éduquée, en bonne santé, disposant d'un pouvoir d'achat suffisant pour acquérir ses produits. Produits dont les matières premières servant à les fabriquer doivent être gérées avec soin, en accordant aux pays d'où elles sont tirées une juste rétribution de nature à favoriser leur stabilité politique et leur développement économique dont profiteront les citoyens et par voie de conséquence, le marché local de l'entreprise. Un cercle vertueux.



Les anathèmes sur l'entreprise vue en monstre égoïste, mue par l'appât du gain à tout prix comme les utopies qui la voudraient altruiste œuvrant pour le seul bien de la planète et de l'humanité relèvent de la caricature. L'entreprise responsable comprend combien la satisfaction de ses intérêts économiques et financiers concorde avec sa capacité à satisfaire les intérêts de son environnement naturel et humain au sens le plus large. Réconciliant réussite économique et progrès social, l'approche RSE fondée sur le "gagnant-gagnant" de la création de valeur partagée peut, si elle est assumée et communiquée en tant que telle, constituer un vecteur de redressement de l'image de l'entreprise vis-à-vis de l'opinion publique.

 


Michel-Hubert Jamard

Ancien directeur de la communication du groupe Areva
Conseil en communication

 

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